Blue Skies

Fan de blues je suis. Dans les insouciantes années de ma vingtaine, j’ai passé plusieurs soirées devant la scène Blues du Festival international de Jazz de Montréal. Ces soirées où l’heure n’importe plus, où le compteur de la gardienne n’est pas en marche puisqu’enfants à garder, il n’y a pas encore. Où on suit la foule, sans destination fixe, se laissant porter au gré des notes et des échos de toutes sortes. Quelques dollars en poche pour une ale un peu trop chère, qu’on boira à petites gorgées. Coup de blues ici. 

Mon vélo orange cadenassé au poteau d’arrêt stop au coin de Clark et Beaubien, je prenais ensuite la 55 St-Laurent qui me déposait en plein coeur de l’effervescence chaleureuse du centre-ville qui s’habillait de tous les rythmes pour l’occasion. J’arrivais sur le site tôt pour m’assurer d’une belle place au centre. Les fesses posées sur mon programme pour éviter l’humidité du gazon sur mes jeans, j’attendais patiemment le show de 19h, en tètant ma bière. Souvent seule. Parfois accompagnée. Profitant des notes, des élans ronds et lourds de guitares, plaintifs accords chantant les amours d’avant.

Puis une fois l’heure passée, pendant que la foule retournait se perdre parmi d’autres rythmes jazzés, parfois latins, souvent rock ou gospel, je restais sur la pointe gazonnée, dans l’attente du show de 21h pour recevoir une seconde dose de blues.  Une heure à jaser tranquillement de tout et rien. Une heure à faire le plein de personnages dans ma besace d’actrice en devenir quand j’étais en solo.

Jamais de retard sur le programme, toujours des découvertes. Mais toujours aussi ces mélodies envoûtantes, qui prennent aux tripes. Le blues, mon bien-aimé. Je ne sais pas d’où me vient cette affection pour ce style parfois un peu poussiéreux et pas toujours surprenant, moi qui suis d’un naturel plutôt positif et spontané. Il faut bien une soupape pour laisser filer la tristesse sans doute.

Le blues, comme un vieux matou qui vient se coller. Qui vient ronronner doucement dans le cou, à la fois rassurant et te donnant une sérieuse claque de mélancolie dans le dos. Récits d’amours perdues, inconsolables, inconciliables ou attendues. Langueur des doux soirs d’été, la canicule qui attend son tour, parce qu’un coup de blues, ça donne déjà assez chaud de même, qu’elle revienne un autre jour. Quand le coeur ébréché aura été pansé.

C’est peut-être ça que j’aime du blues; son effet rassurant, en même temps que sa portée un peu dramatique. Sorte de mini-wheat musical.

Une découverte qui me porte en ce début d’année: Jordan Officer et son album Blue Skies. Un montréalais tout jeune, immensément talentueux reprend sur cet album ses chansons coup de coeur, celles qui l’ont accompagné durant son parcours de musicien.

Il accompagne à son tour mon hiver, celui où je vis dans l’attente espérée de ma pointe de gazon.

 

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