Lettre à mon enfant

Texte paru dans la publication Lettre à mon enfant aux Éditions de Mortagne en 2012.
Adressée à Élie Belzile, 2 ans et demi.

 

Cher beau coeur, petit « garçonni » d’amour…

Par où commencer. Il y a tant et tant de choses que j’aurais à te dire.

Ce matin les mots se bousculent à la sortie. Je dois te ressembler quand tu veux tout dire en même temps, quand les mots cherchent à se tailler une place à la queue leu leu et finissent enfin par se laisser entendre, par ta petite voix si singulière.

Tant de choses à te dire… D’abord que je suis fière de ce que tu es déjà; un petit bonhomme curieux, qui s’émerveille de tout (n’est-ce pas, après tout, la tâche première d’un enfant ?) Expressif comme sa maman et méthodique comme son papa.

Tant de choses aussi à ne pas te dire. Pour ne pas que tu sois noyé d’éloges, pour ne pas te « gâter pourri », pour éviter que tu te croies meilleur que les autres, plus fin, plus beau…quoique !

Je ne te dirai pas que mon orgueil de mère est assouvi quand tu dis bonjour aux étrangers que tu croises sur la rue, les petites fesses bien calées dans ta brouette, la bouche pleine d’une collation croquante qui te laissera les mains collantes et les bisous, sucrés. J’aurais peur que tu ne les salues plus, par peur de l’inconnu.

Je ne te dirai pas que mon cœur de mère se gonfle de fierté quand tu dis spontanément : « merci pour le souper ! » quand nous sommes reçus chez des amis. J’aurais peur que la gêne de paraître faussement flatteur te freine.

Je ne te dirai pas que ça me réjouit de te voir rire aux éclats et trépigner d’excitation quand nous jouons avec les cloportes découverts sous les pots de grès dans la cour. Tu pourrais à l’avenir réprimer ce bonheur simple et le garder pour toi, de peur d’être jugé pour sa simplicité.

Je ne te dirai pas que les larmes me viennent souvent aux yeux quand je te regarde dormir. La respiration profonde, le visage totalement détendu, les cheveux humides collés au front. Je ne te confierai pas une telle émotion, de peur que tu cesses de t’abandonner de la sorte devant moi.

Il y a tant de choses encore que je ne dois pas te dire il me semble…

Je parle de toi au présent mais l’avenir s’approche chaque jour toujours plus, avec ses grosses bottes « de 7 lieues » comme dit si bien ton papa d’amour!

Cet avenir qui fera de toi un garçon toujours plus grand, toujours plus bavard, plus curieux, plus autonome, plus allumé.

Cet avenir qui fera sans doute que tu t’éloigneras de moi. De façon toute naturelle, sournoise, sans désir conscient de me blesser bien sûr.

Tant de choses que je dois taire mais en voici quelques unes que j’aimerais te dire.

Quoi que tu fasses, je ne tiens pas que tu sois le meilleur dans tout. Simplement que tu sois fier de ton accomplissement À TOI.

Que tu sois en accord avec ce en quoi tu crois. Même si ces croyances ébranlent les miennes.

Que tu aies la force de réussir où moi j’échoue trop souvent; soit me faire respecter dans les moments où ça compte vraiment.

Un jour sans doute, tu réaliseras que ta maman n’est pas la meilleure, pas la plus forte, qu’elle n’est pas une super héroïne. J’espère que ça ne te décevra pas trop. Ce jour-là, tu saisiras que ta maman tente de faire de son mieux. Qu’elle essaye de se laisser guider par son cœur et oui, fait des erreurs.

Fais de ton mieux, fais des erreurs toi aussi, trompe-toi et reprends la route, c’est encore la meilleure façon de faire son chemin.

Mon petit garçon, j’espère ne jamais voir le jour où tu n’auras plus besoin de moi.

Parce que je ne sais plus à quoi je servirais.

Allez, retourne jouer. Je t’en ai déjà trop dit…

Je t’aime

 

Ta Petite Maman d’amour

 

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